Kapes Kréyol

Site d'information du CAPES de créole (Sous-domaine du site Potomitan)
(Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré)

Entretien avec

Anthony Compper

Admis au CAPES de créole 2013

Monsieur Compper quelles raisons vous ont poussé à choisir de vous présenter  au CAPES de créole? Quelle est votre deuxième matière?

Tout d’abord, passer le CAPES de créole s’inscrivait dans la continuité de mon parcours universitaire puisqu’en troisième année de licence, j’ai décidé de me diriger vers les langues et cultures régionales et plus particulièrement le créole, après avoir étudié la linguistique, la langue et la littérature créole, en Licence 2 de lettres et sciences humaines appliquées (LSHA). Les raisons qui m’ont principalement motivées à passer ce concours ont été l’envie et la passion que j’ai pour cette langue, qui ensuite m’ont poussées à un perpétuel approfondissement des connaissances sur le créole de la Guyane et les créoles, pour enfin les transmettre aux élèves. Il s’agissait aussi de montrer qu’il était possible d’obtenir ce concours en Guyane, que beaucoup pensaient inaccessible, pour peut-être indirectement ouvrir une porte.

La deuxième matière que j’ai choisie sont les Lettres Modernes dont je possède un Master en outre d’un CAPES. L’intérêt de cette formation est qu’à mon sens elle complète totalement la préparation du concours qui rappelons-le est un concours bivalent et où par conséquent il convient d’avoir de bonnes connaissances dans les deux disciplines choisies. Le fait d’avoir déjà passé un concours en Lettres m’a permis d’être beaucoup plus à l’aise pour la composition française, mais m’a également aidé pour la technique à employer pour le commentaire dirigé du créole ou encore pour les oraux d’une manière générale.

Avez-vous eu recours à quelqu'un ou bien à une institution pour vous aider?

Pour préparer ce concours, je me suis d’abord beaucoup aidé de votre site où j’ai pu consulter des fiches, des exemples de dissertation créole et les rapports de jury plus qu’important dans la préparation d’un concours.

Ensuite, j’ai pu m’appuyer sur des formations organisées à l’IUFM où différents intervenants ont pu nous transmettre un savoir varié touchant plusieurs domaines. Je pense entre autres à Gertrude Denizot, qui m’a beaucoup aidé par ailleurs, à Casimir Anatole pour la grammaire comparée du créole, Isabelle Hidair pour la sociologie et l’histoire des sociétés créoles, Cécile Génolini pour la composition française, Anne-Marie Viguès pour la narratologie, Christian Mendivé pour l’épreuve «Agir en fonctionnaire de l’Etat», Sophie Alby pour le plurilinguisme en Guyane, et surtout Lambert-Félix Prudent, qui nous a fait l’honneur de nous dispenser plus de 24 heures de cours concernant la préparation du CAPES Créole.

Enfin, la personne qui m’a le plus aidé est Louis Honorien. Je tiens à saluer cet homme, d’abord car, avec Monique Blérald, c’est un des professeurs qui m’a donné envie de m’intéresser au créole et à ses secrets. Il faut également mettre en avant son investissement car il a beaucoup donné de son temps et de son énergie pour bien nous préparer et ce, bénévolement. Même s’il y avait beaucoup de travail personnel, il nous a surtout préparé à la traduction et au commentaire dirigé, mais M. Honorien nous a également apporté beaucoup d’éléments sur les cultures et les langues créoles qu’il fallait continuellement approfondir.

Comment expliquer qu’il a fallu attendre 12 ans pour avoir le premier guyanais admis?

En Guyane, il y a beaucoup de personnes motivées et qualifiées pour l’enseignement du créole. Je pense qu’il y a différents facteurs qui peuvent expliquer cette longue attente. Le CAPES est peut-être « mis de côté » du fait que pour enseigner cette matière, une licence en langues et cultures régionales ou encore une habilitation en langue régionale, créole, peut suffire. Un des autres facteurs peut-être la difficulté de ce concours. En effet, c’est un concours bivalent qui concerne donc deux disciplines à part entière et qui demande, par ailleurs, de connaître différentes aires géographiques créoles. Enfin, il y a peut-être le manque d’une formation complète intégrée à un cursus universitaire, par exemple, où toutes les composantes du concours y seraient traitées et approfondies.

En Guyane le créole est-il encore utilisé couramment? Les gens savent aussi le lire et l’écrire? Y-a-t-il des résistances à l’écriture phonétique?

Le créole guyanais est utilisé en Guyane, mais subit la pression d’autres langues comme tout d’abord le français, mais également d’autres créoles comme ceux des Petites Antilles ou d’Haïti, en outre des langues dites de l’immigration que sont l’anglais ou encore le portugais entre autres. De fait, s’il s’avère qu’elle est parlée, elle peut parfois être altérée voire transformée.

Il y a de plus en plus de personnes qui savent le lire et l’écrire, mais pour en voir le nombre augmenter, il faudrait davantage intensifier l’apprentissage du créole à l’école pour ensuite la développer dans un cadre extrascolaire, à l’aide de rédaction d’œuvres diverses.

Il existe forcément des réticences à l’écriture phonétique du fait de la présence d’une écriture étymologisante proche du français. Pour les utilisateurs de cette dernière écriture citée, il s’agit d’écrire le créole à l’aide du code orthographique du français parce qu’il a beaucoup puisé dans le lexique français et pour mettre en avant le lien qui existe entre elles. Mais comme Alfred de St Quentin le disait dans son Introduction à l’histoire de Cayenne (1872), «il est impossible de reproduire, au moyen de l’alphabet d’une langue, la prononciation de tous les mots d’une autre langue».

Pensez-vous rester en Guyane pour enseigner le créole?

Je pense effectivement rester en Guyane pour enseigner le créole, d’une part parce qu’il me semble difficile – mais pas impossible- d’enseigner un autre créole que celui appris, et d’autre part parce que tel a toujours été mon désir que d’enseigner la langue de mon pays. Ma motivation en tant qu’enseignant est de donner aux élèves la possibilité d’apprendre cette langue.

Merci de vous être prêté à cet interview.

Viré monté